La lettre d’opinion ci-dessous a été envoyée aux quotidiens du Nouveau-Brunswick le 7 avril 2022 par la commissaire aux langues officielles du Nouveau-Brunswick, Shirley C. MacLean, c.r.

L’automne dernier, le Commissariat aux langues officielles du Nouveau-Brunswick a commandé un sondage d’opinion publique pour connaître le point de vue de la population néo-brunswickoise sur de multiples aspects des langues officielles dans la province : les attitudes envers le bilinguisme, les relations entre les communautés linguistiques, la qualité et l’importance de l’enseignement des langues dans nos écoles publiques, les perceptions de l’identité, et la prestation des services gouvernementaux dans l’une ou l’autre langue officielle.

Les résultats, publiés le 4 avril, sont clairs : une forte majorité de Néo-Brunswickois (81 %), provenant de toutes les régions de la province, appuie le concept de la Loi sur les langues officielles et du bilinguisme. Ce plus récent sondage reprenait les thèmes abordés lors d’un sondage semblable réalisé par le Commissariat en 2009. À cette époque, l’appui pour les langues officielles s’élevait à 82 % dans la province.

Ainsi donc la population néo-brunswickoise maintient un appui majoritaire pour le bilinguisme aujourd’hui, et cela malgré l’arrivée sur scène pendant les 12 dernières années d’une faction politique ouvertement anti-bilinguisme dans la province. Ce sont des résultats encourageants qui, à mon avis, viennent appuyer la théorie selon laquelle la majorité demeure souvent silencieuse alors que les voix des minorités sont malencontreusement amplifiées, souvent à l’aide des médias sociaux qui peuvent créer un effet de chambre d’écho.

En réalité, les langues officielles et le respect mutuel entre nos deux communautés linguistiques sont des valeurs fondamentales au Nouveau-Brunswick. Dans l’ensemble, la grande majorité d’entre nous sommes fiers de notre statut de seule province bilingue au Canada et voulons continuer à favoriser et à nourrir un Nouveau-Brunswick où nous préservons et promouvons l’égalité de statut, ainsi que l’égalité des droits et des privilèges de la communauté linguistique française et de la communauté linguistique anglaise.

L’appui pour la Loi sur les langues officielles et le bilinguisme est axé sur le respect des deux langues officielles, tandis que l’opposition au bilinguisme se retrouve principalement chez les anglophones qui ont cité la notion de privilège pour les francophones ou les Néo-Brunswickois bilingues en ce qui concerne l’accès aux possibilités d’emploi au sein de la fonction publique. Il est important de noter que cette opposition a été exprimée par une minorité de répondants au sondage et ne reflète pas l’ensemble des Néo-Brunswickois.

Cette notion de favoritisme pour les francophones et les travailleurs bilingues dans la province est un mythe qui perdure depuis longtemps. Selon des données récentes obtenues du gouvernement, les anglophones unilingues ont accès à 55 % des emplois gouvernementaux dans la partie I de la fonction publique provinciale.

La Loi sur les langues officielles cherche à assurer que les Néo-Brunswickois puissent avoir accès aux services gouvernementaux dans la langue de leur choix – elle ne dicte pas que tous les emplois gouvernementaux doivent être occupés par des employés bilingues. Certes, afin de fournir des services dans les deux langues officielles, un nombre de postes sont désignés bilingues dans la province, mais, grâce à une approche d’équipe, bien souvent les employés unilingues peuvent travailler en collaboration avec leurs collègues francophones ou bilingues pour fournir des services publics conformément à la Loi sur les langues officielles.

Par ailleurs, j’estime que les mythes et les mécontentements à la base de l’opposition de certains sont enracinés dans la méconnaissance de la Loi et de ses objectifs. Les résultats du sondage ont démontré une faible connaissance de la Loi sur les langues officielles et de l’existence du Commissariat aux langues officielles en général. Cela m’indique que j’ai encore du pain sur la planche en tant que commissaire.

La Loi sur les langues officielles n’impose pas le bilinguisme aux Néo-Brunswickois. Elle existe pour assurer que chaque personne au Nouveau-Brunswick – nos voisins, nos collègues, nos amis – puisse recevoir les services du gouvernement dans la langue officielle de son choix. Elle est à la racine de notre identité comme province : deux communautés linguistiques, deux langues, avec leurs historiques, leurs richesses, et leurs possibilités.

Au-delà de leurs applications pratiques ici dans la province, nos droits linguistiques sont également reconnus dans la Charte canadienne des droits et libertés, une composante de la Loi constitutionnelle, loi suprême de notre pays. Enchâssés dans la Charte, les droits et privilèges égaux du français et de l’anglais au Nouveau-Brunswick ne sont pas à débattre.

Je vous encourage donc tous à être fiers d’affirmer votre appui sans équivoque pour les deux langues officielles de notre province. Notre statut de province bilingue fait partie de notre identité et la grande majorité d’entre nous en sommes fiers. Manifestez votre appui ouvertement, n’ayez pas peur d’affirmer vos croyances que chaque Néo-Brunswickois, qu’il soit francophone ou anglophone, a un droit fondamental de pouvoir parler sa langue auprès des organismes publics. Ensemble, nous pouvons changer le discours sur les langues officielles et le bilinguisme.